La chasse force les animaux à devenir nocturnes. 68% des espèces de mammifères chassées modifient leurs rythmes circadiens pour éviter les périodes d’activité cynégétique (étude CNRS, 2019). Cette nocturnisation rend l’observation comportementale diurne structurellement impossible.

Les cerfs élaphes, naturellement actifs à l’aube et au crépuscule, deviennent strictement nocturnes dans les zones chassées. Les sangliers, dont l’activité est normalement répartie sur 24 heures, concentrent 90% de leurs déplacements entre 22h et 5h du matin en période de chasse (étude ONCFS, 2018). Les chevreuils abandonnent complètement les prairies ouvertes en journée pour se réfugier dans les fourrés denses.

Cette modification comportementale n’est pas génétique mais adaptative : elle se produit en quelques semaines après le début de la saison de chasse. Les populations non chassées conservent leurs rythmes naturels. Au canton de Genève, où la chasse-loisir est interdite depuis 1974, les cerfs s’observent en plein jour à moins de 20 mètres des sentiers (observations Département du territoire genevois, 2020-2024).

La nocturnisation détruit la possibilité d’observation comportementale. Les scapeurs ne peuvent documenter que des traces indirectes (empreintes, coulées), jamais les comportements sociaux, alimentaires ou reproducteurs qui nécessitent une observation visuelle directe prolongée. Photographier un animal nocturne en forêt demande des dispositifs infrarouges lourds et invasifs, incompatibles avec l’éthique d’observation non-perturbatrice.

L’incompatibilité est absolue : la chasse transforme les animaux diurnes en fantômes nocturnes. L’observation nécessite des espaces sans pression létale où les rythmes naturels peuvent se maintenir.